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5 juillet 2013 5 05 /07 /juillet /2013 18:11

    La salle capitulaire construite en 1299  est située sur la galerie occidentale du cloître ; ses peintures datent du XVIIe. Aux clés de voûte se trouvent les armoiries d’Arnaud de Villar, bienfaiteur généreux du couvent.

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30 juin 2013 7 30 /06 /juin /2013 18:43

 

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    Le clocher, terminé en fin du XIIIe (1298), similaire à celui de saint Sernin, s’élève sur 45 mètres ; il est octogonal sur quatre étages en retrait percés de baies géminées couvertes d’arc en mitre. Sa tour s’élance sans ressauts sensibles avec pour les fenêtres cette forme d’ouverture et leur ornementation : arc brisé ogival, en un angle droit, les fenêtres coiffées en mitre surmontées d’un oculus en losange, posé sur pointe et encadré d’un bandeau de pierre à angle droit. C’est dans le clocher que se trouvait la cloche des Universités qui sonna si souvent le tocsin pour les grands incendies de la Ville et les révoltes des étudiants. En 1562, pendant les sanglantes journées de mai, les Huguenots, maîtres de l’Hôtel-de-Ville bombardèrent les clochers de saint-Sernin, des Cordeliers et des Jacobins. La flèche fut reconstruite puis détruite à nouveau lors de la Révolution.

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    Le cloître (XIVème) s’étendait sur les quatre côtés du préau ; sa construction dura trois années (1307-1310). Les colonnes géminées et les arcades ogivales sont d’une admirable simplicité ; les chapiteaux alternent les motifs végétaux d’inspiration byzantine et des scènes historiées retraçant des épisodes de la Bible. Les murs du cloître furent ornés au XVIIe par le frère Balthasar Moncornet qui décora également les murs du réfectoire. Ces peintures évoquaient des faits survenus dans la vie de saint Dominique ; un toit en appentis repose sur des arcs en briques.IMGP1253IMGP1256IMGP1257IMGP1259IMGP1261

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26 juin 2013 3 26 /06 /juin /2013 11:21

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    Les jacobins sont constitués d’une église, d’un couvent et d’un cloître.

    L’Eglise : est » un de nos plus beaux monuments de la France méridionale » écrit Caumon. Elle est en effet le prototype de la plupart des églises gothiques de notre région sans arcs-boutants et dont les contreforts, s’étageant par ressauts successifs s’élèvent jusqu’au sommet des murs. De 1325 à 1335, la nef est agrandie et voûtée ; les galeries du cloître conduisent à la salle capitulaire, à la cuisine, au réfectoire et aux cellules.IMGP1253

    « Cette église dépasse en beauté, écrit le pape Urbain IV dans sa bulle du 15 juin 1368, toutes les autres églises des Frères Prêcheurs. Je la choisis donc pour Saint Thomas d’Aquin ». Les reliques furent solennellement remises le 28 juin 1369.IMGP0531

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    Construite par l’ordre des frères prêcheurs, les dominicains ou jacobins, à partir de 1215 avec l’arrivée de Dominique de Guzman, cet ensemble est considéré comme un des joyaux de l’art gothique méridional. Sa construction s’acheva au XIVème.IMGP0523

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    Depuis 1329, on y vénère les reliques de Saint Thomas d’Aquin. En 1385, l’église est achevée et consacrée sous le nom d’église Saint Thomas d’Aquin.
Après la Révolution et l’exil des dominicains, les bâtiments devenus bien national furent transformés en caserne, hébergeant une grande manade de chevaux. Une infirmerie vétérinaire fut installée dans la chapelle Saint Antonin et le cloître subit de graves démolitions.

    Ce n’est qu’en 1865 que la Ville redevint propriétaire et les travaux de restauration, commencés en 1920 ne s’achevèrent qu’en 1972 grâce à la ténacité patiente de Monsieur Maurice Prin qui fut nommé conservateur en gratitude de son travail bénévole.IMGP0527

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    L’église mesure 80 mètres de long sur 20 mètres de large. Les piliers ont 22 mètres de haut et le célèbre palmier, chef d’œuvre unique au monde, s’élève à 28 mètres. L’intérieur est peint d’un décor polychrome avec quelques croix languedociennes. De magnifiques vitraux (XIVème) illuminent la vaste nef. Elle est double avec une rangée de sept piliers. Ce qui est le plus remarquable c’est la gerbe de vingt deux nervures qui s’élancent et s’étalent comme les feuilles d’un palmier autour du pilier du chevet soutenant à une hauteur vertigineuse la voûte circulaire où se confondent les deux nefs.

IMGP1252La Châsse de Saint Thomas d'Aquin.IMGP0521IMGP0535IMGP0536IMGP0522Les Vitraux.IMGP1301IMGP1302

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25 juin 2013 2 25 /06 /juin /2013 18:15

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    Le nom des Jacobins fut donné en hommage à son homologue parisien de la rue Saint-Jacques, en France seulement, aux Frères-Prêcheurs ou Dominicains. La création de leur ordre fondé par Saint-Dominique fut autorisée et confirmée par le pape Innocent III au quatrième Concile du Latran en 1215 puis confirmée par le pape Honorius IV en 1212-1213. Comme son nom l’indique leur mission était d’aller prêcher contre l’hérésie ; dans la suite, ils prirent le nom de Dominicains. L’édification de leur monastère dura plus d’un siècle ; L’église, le clocher et la salle Capitulaire sont du XIIIe ; le cloître, la sacristie et le réfectoire des premières années du XIVe et la chapelle Saint-Antonin de 1340. Saint Dominique vint à Toulouse vers 1203 et y commença ses prédications avec cinq autres compagnons en 1205. En 1214, un riche habitant de Toulouse, Pierre Cellani (ou Sellari) qui possédait deux grandes maisons contre la muraille de Toulouse, à côté de la Porte Narbonnaise, en fit don aux religieux et y restèrent jusqu’en 1216. En ce moment la guerre des Albigeois battait son plein ; la bataille de Muret (12 septembre 1213) avait été perdue par les troupes languedociennes ; le roi d’Aragon fut tué ; Simon de Montfort occupait le château-Narbonnais et Toulouse était en sa possession en vertu d’une décision du Concile de Montpellier en 1215, confirmée par celui de Latran de la même année.

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    L’année suivante (1216), Foulques fit donner aux nouveaux religieux l’église de Saint-Romain ou de Saint-Rome, située dans la rue du même nom. Le nombre des religieux s’étant bientôt accru, Saint Dominique fit construire un cloître avec seize cellules et un dortoir au-dessus ; mais il ne vécut pas longtemps à son œuvre puisqu’il mourut le 6 août 1221. Il fut canonisé douze ans après par le pape Grégoire IX en 1234. Les deux maisons de la Porte Narbonnaise restèrent la propriété de l’ordre et devinrent le Tribunal de l’Inquisition ; C’est là que tous les ans, le 26 novembre, les Capitouls venaient présenter la liste des élus afin que le Grand Inquisiteur de la Foi vérifie si, parmi les nouveaux élus, il n’y avait pas quelques hérétiques. En 1229, un habitant de Toulouse, Pons Capdenier, acheta un jardin appelé de Garrigues et de Pierre de l’Orme dont il fit don aux Frères-Prêcheurs pour y bâtir une nouvelle église et leur couvent. L’évêque Foulques marqua les limites des constructions, dont il posa la première pierre, désigna le lieu où devrait être le cimetière qu’il bénit et planta la croix du jardin.

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    L’année suivante, les religieux prirent possession de leur nouveau monastère, le 22 décembre 1230 en présence des autorités ecclésiastiques et du peuple de Toulouse ; on construisit une chapelle provisoire et un cloître (l’édifice mesurait quarante-six mètres par vingt-deux et était coiffé d’une couverture charpentée). C’est dans cette chapelle que Raymond de Falgar, nouvellement promu à l’évêché de Toulouse, célébra, en 1234, la canonisation de Saint Dominique dont il avait été un de ses premiers compagnons. Un événement inattendu vint interrompre la cérémonie : on apprit que non loin de là des cathares étaient auprès d’une vielle femme mourante ; l’évêque et le prieur s’y rendirent en toute hâte, tentèrent d’infléchir la mourante et devant le refus de celle-ci ils la déclarèrent hérétique et la firent transporter avec son lit dans une prairie voisine où elle fut brûlée vive. Depuis quelques temps des faits analogues se multipliaient ; en 1235, sur ordre de frère Cellani, les inquisiteurs ordonnaient d’exhumer dans divers cimetières ceux qu’ils assuraient être morts dans l’hérésie et après avoir fait traîner leurs cadavres à demi pourris ou leurs ossements ils les faisaient brûler. Guillaume Arnaud fit exhumer une vingtaine de cadavres pour les faire brûler.

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    A la suite de ces faits, les Consuls et le Viguier rendirent une ordonnance par laquelle les Frères-Prêcheurs furent chassés de Toulouse, menaçant de mort ceux qui chercheraient à poursuivre toute procédure inquisitoriale et instituant le blocus du couvent. Le 6 novembre 1235, une quarantaine de Dominicains, expulsés manu militari, en procession, allèrent se réfugier à Braqueville (hors des murs) ; leur exil ne dura pas longtemps. Raymond VII, contraint par le pape Grégoire IX, les rappela et ils rentrèrent dans leur couvent le 28 août 1236 mais l’exercice de l’Inquisition ne reprit qu’en 1241.

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    Hugues de Mascaron, évêque de Toulouse (1286 -1296), leur donna des sommes considérables ; peu à peu les dons et les legs testamentaires affluèrent au point que les Dominicains purent acheter 59 maisons pour la construction de leur monastère. L’église actuelle commencée en 1263 avait le chœur terminé en 1292 : le chevet dont le voûtement tout entier est supporté par un seul pilier (le célèbre palmier qu’utilisa Salvador Dali dans son immense toile à la gloire de Saint-Jacques de Compostelle). L’abbé de Moissac y célébrait la première messe le 2 février 1293. En1298, le clocher est érigé pour abriter la cloche de l’Université de Toulouse mais l’édifice ne fut achevé qu’un siècle plus tard en 1385 grâce aux largesses du Cardinal Guillaume-Pierre de Godivo et en 1386 l’église fut consacrée par l’archevêque de Lesbos. Entre 1306 et 1310, un nouveau cloître est construit ainsi que des salles pour recevoir les séculiers qui viennent suivre les cours de théologie et de Droit Canon. 

Veuillez consulter l'affaire de la rue Romiguière - rue Vidale :

  http://www.gegeloccitan-photo.com/article-l-affaire-de-la-carriera-olmi-sicae-117701370.html

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14 juin 2013 5 14 /06 /juin /2013 18:27

    Seigneur, né à Blaye, il participe à la 2ème Croisade (milieu du XIIe) avec le comte de Toulouse, Alphonse Jourdan, celui d’Angoulême, Guillaume de Taillefer et celui de la Marche, Hugues VII de Lusignan.

    Dés le début du XIIe, les comtes de Toulouse, de Anfos jusqu’à Raimond VII, sont de grands protecteurs des troubadours qu’ils accueillent avec bienveillance au sein de leur cour. Ce phénomène est d’ailleurs une des manifestations de la rivalité politique entre Toulouse et les grandes maisons voisines, celle des ducs d’Aquitaine, rois d’Angleterre, et surtout celle des comtes de Barcelone, rois d’Aragon. La cour comtale brille autant par l’éclat et la diffusion de l’esprit de la lyrique courtoise que par sa capacité d’attraction.

 

     Ainsi une quinzaine de troubadours ont vécu successivement à la cour, organisant fêtes et débats courtois et accompagnant les princes dans leurs visites vassales ou dans les guerres contre les rivaux et dénonçant avec violence les exactions des troupes de Simon de Montfort et la cruauté des sentences inquisitoriales ou les transgressions morales des dignitaires de l’Eglise. Marcabru, Jaufré Rudèl, Bernard de Ventadorn, Raimond de Miraval, Gaucelm Faidit, Cadenet, Bertrand de Born et d’autres ont connu ces fêtes des Jeux Floraux où rivalisent troubadours et jongleurs ; c’est le début de ce qui, annuellement, existe à Toulouse aujourd’hui encore.

 

    Marcabrun, poète-jongleur, lui fait parvenir quelques unes de ses œuvres. Il semble qu’il soit tombé si amoureux d’une belle orientale que le poète ne cessera de la chanter dans la désespérance qu’engendrent l’éloignement, l’inaccessibilité et la simple absence de l’être aimé.

    Ce thème traverse toute son œuvre (amour d’autant plus fort que la distance exacerbe le désir et en sublime la passion) d’autant plus émouvante que l’expression des sentiments en est sincère avec un style simple. La renommée de son talent se maintiendra longtemps dans divers courants littéraires en Italie, en Allemagne et en France.

 

Jaufre Rudel

EXTRAIT :

 

Le thème de l’amour impossible revient encore ; le poète semble accepter cette distance du lointain qui le maintient dans l’espoir et le rêve malgré les déconvenues que présentent la réalité et la douleur de l’absence :

 

 

 

Non sap chantar qui son non di

 

Ni vèrs trobar qui mots non fa,

 

Ni conois de rima co-s va

 

Si rason non enten en si.

 

Mas lo mieus chants començ’aissi

 

Com plus l’ausiretz, mais valrà.

 

 

 

Il ne sait pas chanter, celui qui ne fait pas la mélodie

 

Ni trouver des chants, celui qui ne fait pas les paroles,

 

Et il ne sait pas comment il en va de la rime

 

S’il n’en comprend pas la matière.

 

Pourtant mon chant commence ainsi

 

Et plus vous l’entendrez, plus il aura de la valeur.

 

 

 

Nuls om no-s meravilh de mi

 

S’ieu am ào que ja no-m veirà,

 

Que-l cot joi d’autr’amor non a

 

Mas de cela qu’ieu anc non vi,

 

Ni per nul joi aitan non ri,

 

E non sai quals bens m’en venrà.

 

 

 

Que nul ne s’étonne de moi

 

Si j’aime ce qui jamais ne me verra,

 

Car je n’ai joie au cœur d’autre amour

 

Que de celle que je n’ai jamais vue

 

Et pour nulle autre joie je ne me suis autant réjoui

 

Et je ne sais quels biens il m’en viendra.

 

 

 

Cops de joi me fer, que m’aussi,

 

E Ponha d’amor que-m sostrà

 

La carn dont lo cors magrirà,

 

Et anc mais tan grèu no-m feri

 

Ni per nul cop tan non langui,

 

Car non conven ni no s’escà.

 

 

 

Un coup de joie me blesse et me tue

 

Et ma peine d’amour m’ôte

 

Le cœur, ce dont mon corps dépérira

 

Et jamais on ne m’a blessé si gravement

 

Par quelque coup si doux

 

Car cela ne convient pas et ne peut arriver.

 

 

 

 

Anc tan suau non m’adormi

 

Mos esperits tost non fos la,

 

Ni tan d’ira non ac de ça

 

Mon cors adès non fosa qui ;

 

E quand me resvelh al matin

 

Tots mos bons sabers mi desvà.

 

 

 

Jamais si doucement je ne m’endormis

 

Que mon esprit ne fût aussi vite là-bas,

 

Ni tant de douleur je n’eus de là

 

Que mon cœur ne fût vite ici ;

 

Mais quand je me réveille le matin

 

Tout mon beau rêve m’abandonne.

 

 

 

Ben sai qu’anc de lui no-m jausi,

 

Ni ja de mi no-m jausirà,

 

Ni per son amic no-m tenrà

 

Ni convén no-m farà de si;

 

Anc no-m dis ver ni no-m menti

 

E non sai si ja s’o farà.

 

 

 

Je sais bien que d’elle je n’ai jamais joui,

 

Ni qu’elle de moi ne jouira,

 

Ni qu’elle me tiendra pour son ami

 

Ni qu’elle me fera promesse d’elle ;

 

Jamais elle ne m’a dit vrai ou menti

 

Et je ne sais si elle le fera jamais.

 

 

 

Bon es lo vèrs, qu’anc no-i falhi,

 

E tot ço que-i es ben està;

 

E cel que de mi l’aprenrà

 

Gard se no-l franha ni-l pessi ;

 

Car si l’auràn en Caerci

 

En Bertrands e-l coms en Tolzà.

 

 

 

Mon chant est bon, je l’ai fait sans faute,

 

Et tout ce qui s’y trouve est à sa place ;

 

Et celui qui de moi l’apprendra

 

Qu’il se garde de l’abîmer.

 

Ainsi l’auront sire Bertrand

 

En Quercy et le comte de Toulouse.

 

 

Bon es lo vèrs, e faràn i

 

Qualque ren dont om chantarà.

 

 

Mon chant est bon, et là se préparent

 

Des choses que l’on chantera.

 

 

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13 juin 2013 4 13 /06 /juin /2013 10:23
     Seigneur, né à Blaye, il participe à la 2ème Croisade (milieu du XIIe) avec le comte de Toulouse, Alphonse Jourdan, celui d’Angoulême, Guillaume de Taillefer et celui de la Marche, Hugues VII de Lusignan.
    Dés le début du XIIe, les comtes de Toulouse, de Anfos jusqu’à Raimond VII, sont de grands protecteurs des troubadours qu’ils accueillent avec bienveillance au sein de leur cour. Ce phénomène est d’ailleurs une des manifestations de la rivalité politique entre Toulouse et les grandes maisons voisines, celle des ducs d’Aquitaine, rois d’Angleterre, et surtout celle des comtes de Barcelone, rois d’Aragon. La cour comtale brille autant par l’éclat et la diffusion de l’esprit de la lyrique courtoise que par sa capacité d’attraction.
    Ainsi une quinzaine de troubadours ont vécu successivement à la cour, organisant fêtes et débats courtois et accompagnant les princes dans leurs visites vassales ou dans les guerres contre les rivaux et dénonçant avec violence les exactions des troupes de Simon de Montfort et la cruauté des sentences inquisitoriales ou les transgressions morales des dignitaires de l’Eglise. Marcabru, Jaufré Rudèl, Bernard de Ventadorn, Raimond de Miraval, Gaucelm Faidit, Cadenet, Bertrand de Born et d’autres ont connu ces fêtes des Jeux Floraux où rivalisent troubadours et jongleurs ; c’est le début de ce qui, annuellement, existe à Toulouse aujourd’hui encore.
    Marcabrun, poète-jongleur, lui fait parvenir quelques unes de ses œuvres. Il semble qu’il soit tombé si amoureux d’une belle orientale que le poète ne cessera de la chanter dans la désespérance qu’engendrent l’éloignement, l’inaccessibilité et la simple absence de l’être aimé.
    Ce thème traverse toute son œuvre (amour d’autant plus fort que la distance exacerbe le désir et en sublime la passion) d’autant plus émouvante que l’expression des sentiments en est sincère avec un style simple. La renommée de son talent se maintiendra longtemps dans divers courants littéraires en Italie, en Allemagne et en France.
Jaufre Rudel
 
EXTRAIT :
 
Le poète exprime ici son obsession de l’amour lointain et ce qu’il engendre dans les paradoxes des sentiments : langueur, nostalgie et espoir du rêve de l’accomplissement du désir
 
Lanquand li jorn son long en mai
 
M’es bèls doç chants d’aucèls de lonh,
 
E quan me soi partits de lai
 
Ramabra-m d’un amor de lonh :
 
Vau de talant embrocs e clins
 
Si que chants ni flors d’albespins
 
No-m platz plus qu l’iverns gelats.
 
 
 
 Lorsque les jours sont longs en mai
 
J’aime un doux chant d’oiseau, lointain
 
Et quand de là-bas je suis parti
 
Il me souvient d’amour de loin :
 
Du désir je vais morne et courbé
 
Si bien que chant ni fleur d’aubépine
 
Ne me plaisent pas plus que l’hiver gelé.
 
 
 
Ben tenc lo Senhor per verai
 
Per que ieu verai l’amor de lonh;
 
Mas per un ben que m’en eschai
 
N’ai dos mals,car tan m’es de lonh,
 
Ai! Car me fos lai pelegrins,
 
Si que mos fusts e mos tapis
 
Fos per sieus bèls uèlhs remirats!
 
 
 
Je tiens le Seigneur pour certain
 
Puisque je verrai l’amour de loin ;
 
Mais pour un bien qui m’en échoit
 
J’en ai deux maux, car il est si lointain,
 
Hélas ! Que ne suis-je là-bas pèlerin,
 
Afin que mon bourdon et mon esclavine
 
Soient par ses beaux yeux contemplés.
 
  
 
Be-m parrà jois quand li querrai,
 
Par amor Dieu, l’albèrg de lonh :
 
E s’a lèis platz albergarai
 
Pres de lèis si be-m soi de lonh :
 
Adonc parrà-l parlaments fins
 
Quand druds lonhdàs èr tan vesins
 
Qu’ab bèls dits jausirà solaç.
 
 
 
Bien me paraîtra la joie quand je lui demanderai
 
Pour l’amour de Dieu, l’auberge de loin,
 
Et s’il lui plaît, je serai hébergé
 
Près d’elle, alors que je suis si loin.
 
Alors l’entretien paraîtra charmant
 
Quand l’amant si loin sera si proche,
 
Qu’avec de deux propos il pourra jouir à loisir.
 
 
 
Irats e jausent m’en partai,
 
S’ieu ja la vei, l’amor de lonh :
 
Mas non sai quora la veirai
 
Car trop sont nostra s tèrras lonh :
 
Assattz i a pas camins,
 
E per aiço no-n soi devins
 
Mas tot sia com a Dieu platz !
 
 
 
Triste et joyeux je quitterai
 
Si je le vois, cet amour lointain :
 
Mais je ne sais pas quand je le verrais
 
Car nos pays sont trop éloignés ;
 
Et il y a tant de passages et de chemins
 
Que je ne sais rien deviner
 
Mais que tout soit comme il plaît à Dieu !
 
 
 
Ja mais d’amor no-m jausirai
 
Si no-m jau d’est’amor de lonh,
 
Que gençor ni melhor no-n sai
 
Ves nula part, ni près ni lonh;
 
Tant es sos prètz verais e fins
 
Que lai el renh dels Sarasins
 
Fos ieu per lèis chaitius clamats !
 
 
 
Jamais d’amour je ne jouirai
 
 Si je ne jouis pas de cet amour de loin
 
Car je n’en connais de plus gent ni de meilleur
 
Nulle part, ni près ni loin
 
Son mérite est si vrai et si parfait
 
Qua là-bas au royaume des Sarrasins
 
Je voudrais pour elle être appelé captif
 
  
 
Dieu que fètz tot quant veu ni vai
 
E formet cest’amor de lonh
 
Mi don poder, que cor ieu n’ai,
 
Qu’ieu veja cest’amor de lonh,
 
Veraiament, en tals aisins,
 
Si que la cambra e-l jardins
 
Mi ressembles tots temps palats!
 
 
 
Dieu qui fit tout ce qui va et vient
 
Et qui forma cet amour de loin
 
Me donne le pouvoir, car j’en ai le courage
 
De voir cet amour de loin
 
Réellement et en telle demeure
 
Que la chambre et le jardin
 
Soient pour moi toujours un palais.
 
 
 
Ver ditz qui m’apela lechai
 
Ni desiron d’amor de lonh,
 
Car nuls autres jois tan no-m plai
 
Com jausiments d’amor de lohn,
 
Mas ço qu’ieu vuèlh m’es atais,
 
Qu’enaissi fadèt mos pairins
 
Qu’ieu amès e non fosa mats.
 
 
 
Il est vrai que celui qui me dit avide
 
 Et désireux d’amour de loin
 
Car nulle autre joie ne me plaît plus
 
Que de jouir d’amour de loin
 
Mais ce que je veux m’est interdit
 
Car mon parrain m’a jeté un tel sort
 
Que j’aime et ne sois pas aimé
 
  
 
Mas ço qu’ieu vuèlh m’es atais,
 
Tots sia maudits los pairins
 
Que-m fadèt qu’ieu non fosa mats !
 
 
Mais ce que je veux m’est interdit
 
Maudit soit donc le parrain
 
Qui m’a voué à ne pas être aimé !
 
 
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20 mai 2013 1 20 /05 /mai /2013 10:44

    Seigneur, né à Blaye, il participe à la 2ème Croisade (milieu du XIIe) avec le comte de Toulouse, Alphonse Jourdan, celui d’Angoulême, Guillaume de Taillefer et celui de la Marche, Hugues VII de Lusignan.

 

    Dés le début du XIIe, les comtes de Toulouse, de Anfos jusqu’à Raimond VII, sont de grands protecteurs des troubadours qu’ils accueillent avec bienveillance au sein de leur cour. Ce phénomène est d’ailleurs une des manifestations de la rivalité politique entre Toulouse et les grandes maisons voisines, celle des ducs d’Aquitaine, rois d’Angleterre, et surtout celle des comtes de Barcelone, rois d’Aragon. La cour comtale brille autant par l’éclat et la diffusion de l’esprit de la lyrique courtoise que par sa capacité d’attraction.

 

    Ainsi une quinzaine de troubadours ont vécu successivement à la cour, organisant fêtes et débats courtois et accompagnant les princes dans leurs visites vassales ou dans les guerres contre les rivaux et dénonçant avec violence les exactions des troupes de Simon de Montfort et la cruauté des sentences inquisitoriales ou les transgressions morales des dignitaires de l’Eglise. Marcabru, Jaufré Rudèl, Bernard de Ventadorn, Raimond de Miraval, Gaucelm Faidit, Cadenet, Bertrand de Born et d’autres ont connu ces fêtes des Jeux Floraux où rivalisent troubadours et jongleurs ; c’est le début de ce qui, annuellement, existe à Toulouse aujourd’hui encore.

 

    Marcabrun, poète-jongleur, lui fait parvenir quelques unes de ses œuvres. Il semble qu’il soit tombé si amoureux d’une belle orientale que le poète ne cessera de la chanter dans la désespérance qu’engendrent l’éloignement, l’inaccessibilité et la simple absence de l’être aimé.

 

    Ce thème traverse toute son œuvre (amour d’autant plus fort que la distance exacerbe le désir et en sublime la passion) d’autant plus émouvante que l’expression des sentiments en est sincère avec un style simple. La renommée de son talent se maintiendra longtemps dans divers courants littéraires en Italie, en Allemagne et en France.

Jaufre-Rudel-copie-1.JPG

EXTRAIT :

Chant de l’amour inaccessible :

Quand lo rius de la fontana             Quand le ruisseau de la source

S’es clarzis, si com far sol,               Devient plus clair, comme cela arrive,

E per la flors aiglentina,                  Que paraît la fleur de l’églantier,

E-l rossiholets el ram                       Et que le petit rossignol sur la branche

Volf e refranh et aplana                   Roule et répète et polit

Son doç chantar et afina,                 Sa douce chanson, et l’affine,

Dreits es qu’ieu lo mieu refranha.   Il est juste que je reprenne la mienne.

                                                    

 

Amors de tèrralondanha,                  Amour de terre lointaine

Per vos lo cors mo dol ;                     Pour vous tout mon coeur est dolent ;

E-non posc trovar meisina,               Et je n’y peux trouver remède

Si non vau al sieu reclam                  Si je ne me rends à son appel,

Amb atrait d’amor doçana               Dans l’attrait d’un doux amour,

Dins vergièrs o sotz cortina               Dans un verger ou sous courtine

Amb desirada companha.                  Avec une amie désirée.

 

Pos del tot m’en faih aisina,         Puisqu’il ne m’en est pas donné l’occasion

No-m meravilh s’ieu n’aflam;          Je ne m’étonne pas si je suis enflammé;

Car anc gencer crestiana                  Car jamais plus gente chrétienne

Non fo, ni Dieus non la vol,              Ne fut, Dieu ne le veut pas,

Juseva ni Sarasina ;                          Ni Juive ni Sarrasine ;

Et es ben paussuts de mana             Et il est bien repu de manne

Qui ren de s’amor gasanha.            Qui un peu de son amour acquiert.  

 

De desir mos cors non fina                   De désir mon cœur ne cesse

Vas cela ren qu’ieu plus am,                Pour celle que j’aime entre toutes,

E cre que volers m’engana                  Et je crois que mon vouloir se trompe

Si cobeseça la-m tol ;                             Si convoitise me la ravit;

Que plus es ponhents qu’espina            Car elle est plus poignante qu’épine

La dolors que amb joi sana ;                  La douleur qui par la joie guérit ;

Dont ja non volh qu’om m’en planha.  C’est pour cela que je ne veux pas

                                                                    qu’on m’en plaigne.

 

Senes brèu de pargamina                        Sans bref de parchemin

Tramès le vèrs que chantam,            J’envoie cette chanson que nous chantons,

Plan et en lenga romana,                     Simplement et en langue romane,

A’N Ugon Brun per Filhol.                  Au seigneur Uc le Brun, par Filhol.

Bon m’es car gents peitavina              Il me plaît que la gent poitevine

E tots Angèus e Guiana                       Tout Angers et la Guyenne

S’njau per leis e Bretanha.                Se réjouisse par elle, et même la Bretagne.

  IMGP7671

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10 mai 2013 5 10 /05 /mai /2013 18:14

L’INSUPPORTABLE ET IGNOBLE CRIME.

ou rue de l’Orme Sec (actuellement rue Romiguières)

IMGP0494 

l – l’histoire de la rue : 

    Cette rue longeait l’ancien rempart romain qui au moyen âge séparait le Bourg de la Cité (XIe) et anciennement carriera Olmi Sicae. Plusieurs rues de la ville ont porté la désignation arboricole de l’Orme, arbre qui, dans la tradition romaine, portait, outre la beauté du tronc et les bienfaits de la frondaison généreuse, bonne fortune. Elle porta plus tard le nom de rue Vidalle, du nom de la tenancière qui possédait deux Jeux de Paume (XIVe). Au XVe, elle se confondait avec la rue Deville et  porta même le nom de rue du Collège de Foix tant celui-ci prenait quasiment tout l’espace de la rue.

    En 1679, Jean de Madran, trésorier général de France acheta l’un des Jeux de Paume pour en faire une résidence princière. Elle fut longtemps habitée par des étudiants qui vivaient dans des maisons communes ou « hospitia ». C’est par décret impérial (1851) que sa désignation fut supprimée et remplacée par le nom actuel.

 

2 – Le contexte :

    Dès le début de 1234, les tribunaux inquisitoriaux sont installés à Toulouse, Albi Montpellier, Avignon et Carcassonne. Les premiers inquisiteurs, formés sur les bancs de l’Université à la théologie et à la rhétorique, sont en place, bénéficient d’une véritable équipe administrative (clercs et notaires participent aux enquêtes et interrogatoires), nomment des vicaires auxquels ils délèguent leurs pouvoirs et des commissaires chargés d’interroger les suspects. Ils prennent leurs nouvelles responsabilités avec grand zèle.

    Un suspect d’hérésie ne pouvant être enterré en terre chrétienne et un hérétique devant être brûlé selon la bulle du pape Grégoire IX « Excommunicamus » de 1231, ils s’en prennent aux morts et à Cahors comme à Albi des cadavres exhumés sont jetés dans les flammes.

   Les vivants n’échappent pas à la répression : à Albi, Pierre Pechperdut et Pierre Bomassip, deux parfaits remis au bras séculier par Arnaud Cathala et Guillaume Pelhisson, inquisiteurs, sont brûlés sur le champ.

   Certains cathares préfèrent abjurer, à l’instar de Raymond Déjean, un parfait d’Albi, qui reconnaîtra ses erreurs. Cette atmosphère permanente de délation et de répression est mal supportée par les populations.

    A Toulouse un artisan, traité d’hérétiques par un voisin porte plainte pour diffamation devant les consuls. Le voisin, condamné à payer une amende, est relaxé grâce au soutien des deux inquisiteurs toulousains, Pierre Sellan et Guillaume Arnaut. L’artisan, condamné doit fuir en Lombardie.

    Un autre artisan, Jean Tisseyre, comparaît. Il se défend d’être un hérétique mais les inquisiteurs le remettent au bras séculier. Devant l’hostilité de la foule, il ne peut être conduit au bûcher et est placé dans un cachot qu’il partage avec des parfaits arrêtés à Lavaur. Il demande à ceux-ci d’être consolé et subira avec eux le supplice du bûcher.

 3 – L’affaire :

    Le 5 août 1234,  le jour où se célébrait la récente canonisation de Saint Dominique, l’évêque de Toulouse Raymond du Fauga, ancien prieur provincial des Frères Prêcheurs, se rend au couvent des Jacobins pour y dire la messe solennelle. IMGP0529.JPG

    Après l’office, il se rend au réfectoire avec les autres Frères quand il apprend par l’inquisiteur Pons de Saint-Gilles qu’une vieille femme impotente de la rue de l’Orme Sec, à deux pas du couvent, venait de recevoir le » consolament » des mourants.

    Aussitôt, l’inquisiteur et quelques Frères accompagnent l’évêque de Toulouse qui se fait passer pour l’évêque cathare Guilhabert de Castres et entend la confession de la malade. Voici ce qu’en dit Guillaume Pelhisson :

     « Quelqu’un dit à la malade : « Voyez, Madame, le seigneur évêque vient à vous ! »               Comme l’évêque entra aussitôt avec les autres, il ne put rien lui dire de plus.

     L’évêque s’assit devant elle et commença à lui parler abondamment du mépris du monde et des choses  terrestres.

     Et comme elle avait entendu dire que l’évêque des hérétiques la visiterait, car elle avait déjà été faite hérétique, elle répondit en tout très librement à l’évêque. Mais celui-ci, avec beaucoup de ruse, lui arracha sur de nombreux points ce en quoi elle croyait ; presque tout correspondait à ce que croient les hérétiques.

      Alors l’évêque ajouta : «  Vous ne devez pas mentir sur le reste ni vous soucier beaucoup de cette misérable vie » et autres choses du même genre. « C’est pourquoi je vous dis de rester constante dans votre croyance, de ne rien confesser d’autre par peur de la mort, que ce que vous croyez fermement en votre cœur ».

     Entendant cela, elle répondit : « Je crois ainsi, Monseigneur, comme je le dis et je ne changerai pas pour ma pauvre et misérable vie ».

     L’évêque dit alors : « Alors vous êtes hérétique car c’est la loi des hérétiques que vous venez de confesse ; sachez avec certitude que les hérétiques manifestes et condamnées.     Abandonnez tout cela et croyez ce que croit l’Eglise romaine et catholiques ! Je suis en effet votre évêque de Toulouse, je prêche la foi romaine et catholique, je veux et ordonne que vos croyiez ! ».

    Il lui dit cela et bien d’autres choses devant tous et l’exhorta à plusieurs reprises mais cela ne servit à rien. Bien au contraire, elle persévéra encore plus dans son obstination hérétique.

    Alors l’évêque, ayant aussitôt convoqué le viguier et beaucoup d’autres personnes qui étaient en le pouvoir de Jésus-Christ, la condamna comme hérétique. Le viguier la fit porter jusqu’au bûcher au Pré du Comte avec le lit sur lequel elle était et la fit immédiatement brûler.

(…) Ceci fait, l’évêque, les Frères et leurs compagnons allèrent au réfectoire et mangèrent avec joie ce qu’on avait préparé, rendant grâces à Dieu et à Saint Dominique… ».IMGP3029.JPG

 

3 – Conséquences :

    Guillaume Pelhisson raconte que le gendre de la suppliciée, Peytavi Boursier, fut arrêté et il s’en suivit une enquête sur toute la famille tandis que la maison de la malade fut rasée et ses biens emportés. On arrêta aussi un compagnon de Peytavi Boursier, un certain Bernard Aldric. « Tous deux confessèrent, ajoute Guillaume Pelhisson, beaucoup de choses sur leur hérésie et dénoncèrent courageusement beaucoup de gens importants..»Ils furent condamnés au « mur large » ou prison au régime « de l’eau de tribulation et du pain de la douleur ».

    L’action de l’Inquisition toulousaine s’amplifie ; chaque dénonciation permettait d’ouvrir une nouvelle enquête, une seule confession pouvait lancer le tribunal sur de multiples pistes.

    Début 1235, les inquisiteurs organisent une vaste prédication générale ; les toulousains qui veulent se confesser sont si nombreux que les dominicains doivent appeler en renfort les franciscains et les curés de la ville. Arnaud Domergue ne s’est pas confessé, il est arrêté. Menacé du châtiment suprême, il dénonce sept parfaits qui seront capturés aux Cassès. Il est assassiné chez lui en pleine nuit. Est arrêté également un ancien consul, un homme âgé, Guillaume Delort. Libéré par des amis qui le cachent il est condamné par contumace.

    Pendant ce temps, les cadavres continuent à être exhumés, promenés en procession et brûlés.IMGP1027.JPG

    La population toulousaine gronde et, pour la calmer, Raimond VII démet son majordome, Durand de Saint-Bars par trop passif face aux débordements des inquisiteurs et nomme à sa place PierreToulza.

    Guillaume Arnaut a quitté momentanément la ville, le 8 avril 1233 pour se rendre à Carcassonne dans le cadre de l’enquête que le pape a ordonné sur la famille de Niort. A son retour, il cite à comparaître devant le tribunal de l’Inquisition douze notables, croyants d’hérétiques avérés. Non seulement ils ne se présentent pas mais ils le somment de quitter la ville ou d’arrêter toute procédure inquisitoriale. L’inquisiteur refuse ; il est expulsé.

    En octobre 1235, il écrit depuis Carcassonne à Pons de Saint-Gilles et aux clercs de Toulouse leur demandant de poursuivre la procédure.

   Les consuls les font expulse à leur tour, menaçant de mort ceux qui chercheraient à prendre leur suite et instituant le blocus du couvent des Prêcheurs. Les quarante Frères Prêcheurs de Toulouse sont même expulsés de la ville. L’opération se déroule le 5 novembre 1235. le 1à novembre, Guillaume Arnaut excommunie onze consuls et Raimond VII comme « fauteurs d’hérétiques ».

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6 mai 2013 1 06 /05 /mai /2013 16:45

    Un des cadets de la famille des viguiers de Barbézieux, arrière-vassaux des comtes d’Angoulême, Rigaut est contemporain de Marcabrun et de Cercamon et connaît les premiers chants de Peire d’Alvernhe et de Bernard de Ventadour.

 

    Lettré et particulièrement  admirateur des grands maîtres de la prosodie gréco-latine, il fait appel aux multiples visages de la Nature (faune, flore, minéral, ciel et astronomie) pour composer ses œuvres bucoliques.

 

   Métaphores et métamorphoses, imitées d’Ovide, émaillent la description et la fragilité des sentiments amoureux avec de délicates mélodies. Dans la tradition de l’art des troubadours il crée donc une originalité qui explique sa renommée à travers les siècles dans de nombreux pays.

 

Il nous reste de lui neuf « cançons ».

Rigaud de Berbesilh

EXTRAITS :

   En l’honneur de la la femme de Jaufré de Taunay, le poète chante sa beauté, sa perfection féminine, la pureté de sa grâce qui lui apportent joie et émotion du cœur mais aussi souffrance par son inaccessibilité ; il espère donc que sa loyauté et la soumission aux désirs de sa Dame seront recompensés car «  bon amour se gagne à bien servir ».

Atresse com Percevaus                               De même que Perceval

Del temps que vivia                                     Au temps qu’il vivait

Que s’esbaf d’esgardar                               Fut émerveillé en regardant

Tan qu’anc non saup demandar                Tant qu’il ne sut pas demander

De que servia                                                A quoi servait

La lança ni-l grasaus,                                  La lance et le Graal,

Et ieu soi atretaus,                                        Je suis interdit aussi

Mièlhs de Dona, quand vel vostre cor gent, Mieux-que-Dame quand je vois votre

                                                                                       gent corps

Qu’eissament                                                Et pareillement

M’oblit quand vos remir ;                              Je m’oublie quand je vous contemple

E-os cug prejar e non fauc, mas consir. Je crois vous prier et ne le fais pas, et je rêve

 

Ab un doç esgards coraus                         Si par de doux regards tendres,

Que an fait lor via                                      Qui ont fait leur chemin

Per mos uolhs sens retornar                      Par mes yeux et sans retour

Et cor, ont los tenc tan car,                            Jusqu’au cœur où ils me sont si chers

Que si os plasia                                            Il vous plaisait

Qu’aitals fos mos chaptaus                        De me donner la récompense

Dels trebalhs e dels maus,                         Des peines et des maux

Mièlhs-de-Dona, que trac per vos sovent,   Mieux-que-Dame que pour vous je

                                                                                     souffris,

Tan greument,                                                Si cruellement

Mais am per vos morir                               J’aimerai mieux mourir pour vous

Que d’autr’aver nul joi, tan vos desir.  Que d’avoir joie d’une autre, tant je vous

                                                                                 désire.

Si-l vostre durs cors fos taus                  Si votre cœur dur était tel

Com la cortesía                                        Que la courtoisie

Que-os fai d’avinent parlar,                    Qui vous fait parler si gracieusement

Lèu pogratz de mi pensar                       Vous pourriez sans peine penser

Qu’ans m’auciria                                    Que je me tuerais plutôt

Que-os pregués, car non aus :               Que d’oser vous prier :

Qu’en mon cor tenc enclaus,                 Car dans mon cœur je garde enclos

Mièlhs-de-Dona, de vos un pensament   Mieux-que-Dame, un souvenir de vous

Tan jausant                                               Si heureux

Que quand en ren m’asir,                      Que quand en rien je m’attriste

Del doç pensar perd l’ir’ab l’esjausir. Par ce doux penser je perds tristesse et

                                                                                  m’éjouis.

 

Si com l’estela jornaus,                         Comme l’étoile du matin,

Que non a paria,                                     Qui n’a pas sa pareille

Es vostre rics prètz sens par ;                Votre grand mérite est sans égal ;

E l’uolh amoros e clar,                           Et vos yeux amoureux et clairs,

Francs sens feunia,                                  Purs et sans félonie,

Bèls cors! Plasent e gaus,                        Beau corps, plaisant et joyeux,

De tota eutats claus,                                Lieu de toute beauté,

Mièlhs-de-Dona, e de bèl estament ;     Mieux-que-Dame, et de haute condition

Que-m defend                                           Qui défend

Lo pensar d’esmarir ;                               Ma pensée de l’affliction;

Dont non poto m deslonhar ni gandir!    Et dont on ne peut s’éloigner ni fuir.

 

Bona dona naturaus,                             Parfaite et noble dame,

Mercé vos querria,                                Je vous requerrais merci

Que pogués mercé trovar                     Si je pouvais la trouver

Ab vos, que per autr’afar                     En vous, car de rien d’autre

Gaug no-m daría                                  Je n’aurais de joie ;

Mercé-os cl m e non aus,                      Je vous crie merci et ne l’ose pas,

Mercé es mon chaptaus,                       Car merci est ma ressource

Mièlhs-de-Dona ; si mercés no-os en pren, Mieux-que-Dame, et si vous n’avez pas

                                                                                     pitié,

Verament                                                       En vérité

M’er per vos a morir ;                                  Pour vous je devrai mourir

Res mas mercés no-m pot de mort garir.     Seule merci peut me sauver de la mort.

 

Vièlha de sen e de laus,                         Vieille d’esprit et de gloire,

Joves ont jois lia,                                    Jeune où la joie habite,

Vièlha de prètz e d’onrar,                      Vieille de prix et d’honneur,

Joves de bèl domnejar,                            Jeune de belle courtoisie,

Lonh de folia ;                                           Loin de folie ;

Vièlh’en tots fachs leiaus,                       Vieille en tous faits loyaux

Jiv’ont jovents es suaus,                            Jeune où jeunesse est douce,

Mièlhs-de-Dona, vièlh’en tot bèl jovent,   Mieux-que-Dame, vieille en belle jeunesse

Avinent                                                        Avenante

Vièlha sens vielhesir                                 Vieille qui ne vieillit pas

E joves d’ans e de bèl aculhir.         Si jeune d’années et de bel accueil.

croix occitane 

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2 mai 2013 4 02 /05 /mai /2013 18:36

        Né probablement à Saint-Donat-sur- L’herbasse  Drôme), sa « Vida » raconte que son œuvre est un pamphlet contre les exactions des armées croisées sur toutes les terres de la vallée du Rhône puis sur celles du Languedoc.

 

    Il dénonce le traitement réservé par Simon de Montfort à la Dynastie des Trencavel et en particulier la mise à sac de Béziers (1209), le massacre de Carcassonne (1209) et la mort de Raymond-Roger Trencavel (1209), la tuerie de Minerve(1210).

 

Dès le début du XIIe, les comtes de Toulouse deviennent les grands protecteurs des troubadours. Ils n’hésitent pas à s’entourer de poètes qu’ils accueillent avec bienveillance au sein de leur cour. Ce phénomène est d’ailleurs une des manifestations de la rivalité politique entre Toulouse et les grandes maisons voisines, celle des ducs d’Aquitaine , rois d’Angleterre, et surtout celle des comtes de Barcelone, rois d’Aragon.

 

La cour comtale brille autant par la diffusion de l’esprit de la lyrique courtoise que par sa capacité d’attraction : les comtes réunissent les conditions matérielles et sociales nécessaires à la constitution d’une cour, lieu de création et de réception de la poésie, du chant et des spectacles de jonglerie.

 

C’est ainsi que se trouvent une quinzaine de troubadours tels Peire Vidal, Gaucelm Faidit, Raimon de Miraval, Jaufré Rudel, Guillem Ademar, Aimeric de Peguilhan, Guillem Figueira et Gui de Cavaillon, que les comtes, d’Alphonse Jourdain à Raimond VII, associent à leurs déplacements soit dans le contexte guerrier soit dans les visites protocolaires à leurs vassaux. C’est ainsi que naît et se perpétue encore aujourd’hui la cérémonie annuelle des Jeux Floraux où se fête l’art poétique occitan.

 

     Il célèbre la victoire des Albigeois contre les Croisés avec les victoires de Raymond VI qui reconquiert ses fiefs. Il accuse Simon de Montfort de sa cruauté, sa sauvagerie aveugle, sa fourberie lors des sièges de Toulouse (1216 puis 1218).

 

    Il a vécu longtemps en Lombardiefuyant comme tant d’autres les troupes royales et les tribunaux inquisitoriaux ?

 

    On conserve de lui neuf pièces dont deux « tençons »,trois « descorts », deux « sirventès » et un « planh » que voici.

  Guilhem-Augier-Novela.JPG

ŒUVRE :

    Le  poète  évoque le martyre et la mort de Raymond-Roger de Trencavel lors du siège de Carcassonne où il est fait prisonnier, jeté au cachot où il mourra de dysenterie le 10 novembre 1209.

 

   Il s’élève avec une farouche indignation contre la barbarie des troupes de Simon de Montfort et de ses barons du Nord et surtout le manquement aux règles convenues de la chevalerie.

 

Cascuns  plor  planh son damnatge,

Sa malananç’e sa dolor,

Mas ieu las ! n’ai en mon coratge

Tan  grand ir’e tan grand tristor,

Que ja mos jorns planh ni plorat

Non aurai lo valent presat,

Lo pro vescomte que mort es,

De Besèrs, l’ardit e-l cortés,

Lo gai e-l mièlhs adrech e-l blond,

Lo melhor cavalièr del mond.

 

Chacun pleure et plaint son dommage

Son malheur et sa douleur.

Mais moi hélas ! j’ai dans mon cœur

Une si grande colère et une si grande tristesse

Que je n’aurai pas assez de toute ma vie

Pour plaindre et pleurer le brave et valeureux

Et preux vicomte qui est mort

Celui de Béziers, le hardi et courtois,

Le joyeux et le plus juste, aux cheveux blonds,

Le meilleur chevalier du monde.

 

Mort l’an et anc tan grand otratge

Non vi om ni tan grand error,

Fach mai ni tan grand estranhatge

De Dieu et a Nostre Senhor,

Com an fach li can renegat

Del fals linhatge de Pilat

Que l’an mort, e pos Dieus mort pres

Per nos a salvar, semblant es

De lui qu’es passats al sieu pont

Per los sieus estorcer l’aond.

 

Ils l’ont tué et jamais si grand crime

Ni si grande faute on ne vit,

Ni un fait si étranger

A Dieu et à Notre Seigneur

Que celui commis par ces chiens renégats

De lignage félon de Pilate

Qui l’ont tué, et si Dieu a reçu la mort

Pour nous sauver, il en est de même

De lui, qui a subi le même sort

Pour délivrer les siens et les secourir.

 

Mil cavalièrs de grand linhatge

E mil donas de grand valor

Iran per la soa mort aratge,

Mil borgés e mil servidor

Que tots foran gent eretat

S’el visqués e ric et onrat.

Ar es mort ! A Dieus quals dans es !

Gardatz quals ètz ni qu-os es pres

Ni cel qui l’an mort qui ni dont

Qu’eras no-os acuèlh ni respond.

 

Mille chevaliers de grand lignage

Et mille dames de grande valeur

Par sa mort seront désespérés

Et aussi mille bourgeois et mille serviteurs

Qui tous auraient été bien dotés,

Riches et honorés, s’il avait vécu.

Maintenant il est mort !Ah Dieu, quel grand dommage !

Regardez qui vous êtes et ce qu’on nous a pris,

Et ceux qui l’ont tué, qui ils sont et d’où qu’ils viennent,

Car maintenant il ne nous accueille ni nous répond.

 

A senhor ! Tan fort deu salvatge

Esser al grand et al menor,

Quand del sieu onrat senhoratge

Nos membrarà, e de l’onor

Que-ns fetz e de la feusautat

Quand per nos l’agran mort jutjat,

Er es mort, ai Dieus ! Quals dans es !

Caitiu, come m tots a mal mes !

Ves, qual part tenrem ni ves ont

Penrem port ? Tot lo cor m’en fond.

 

Ah seigneurs ! Ce sera bien horrible

Pour les grands et les petits,

Quand de son honorée seigneurie

Nous nous souviendrons, et de l’honneur

Qu’il nous fit et de sa fidélité,

Quand ils le condamnèrent à mort pour nous

Ah Dieu, maintenant il est mort ! Quel dommage est-ce !

Misérables ,comm nous voilà tous mis à mal !

De quel côté nous  tournerons-nous et vers quel

Port irons-nous ? Tout le cœur m’en fond.

 

Ric cavalièr, ric de linhatge,

Ric per orguèlh, ric per valor,

Ric de sen, ric par vassalatge,

Ric per dar e bon servidor,

Ric d’orguèlh, ric d’umilitat,

Ric de sen e ric de foudat,

Bèls e bons complits de tots bens,

Anc non fo nuls om que-os valgués.

Perdut avem en vos la font

Dont tot veniam jausion.

 

Riche chevalier, riche de lignage,

Riche de fierté, riche de valeur,

Riche d’esprit, riche de bravoure,

Riche pour donner et bon serviteur,

Riche d’orgueil, riche d’humilité,

Riche de raison et riche de folie,

Bel et bon, plein de tous biens,

Jamais ne fût homme qui vous valût.
En vous nous avons perdu la source

D’où tous nous revenions joyeux.

 

Cel Dieu prèc que fetz trinitat

De si meseis en deitat

Que-l cel ont lo major gaugs es,

Meta l’arma e non li pes,

Et a tots cels qui pregats son

De son ben socore et aond.

 

Je prie Dieu, qui fit la trinité

De lui-même en divinité,

Qu’au ciel où est plus grande joie,

Il accueille son âme et l’élève

Et qu’à tous ceux qui le prient

Il apporte pour leur bien secours et aide.

 

Bèl Papagais, anc ten vesat

No-om tenc amors qu’ar plus torbat

No-m tenga el dan que ai pres

Del melhor senhor qu’anc nasqués

Aitan quant clau mar en redon

Que m’an mort trachor non sai dont.

 

Bel Pagagai, jamais aussi joyeux

Amour ne m’a tenu qu’il ne me tient

Plus triste aujourd’hui par la perte éprouvée

Du meilleur seigneur qui jamais naquit

Dans les terres que la mer enclôt

Et que m’ont tué des traîtres venus je ne sais d’où.

IMGP3587  

 

N.B. : nous avons écrit un article sur le siège de Carcassonne et ses conséquences dans Gégéloccitan.

 http://www.gegeloccitan.com/article-carcassonne-la-basalique-st-nazaire-les-chapelles-107297567.html

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